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Liberté de la presse dans le monde

 

IXe Sommet de la Francophonie Beyrouth, Liban - 18 au 20 octobre 2002

La Francophonie assiste passivement aux violations quotidiennes de la liberté de la presse

Reporters sans frontières demande la suspension de la Guinée équatoriale, du Laos, de la Tunisie et du Viêt-nam

Sur les cinquante-cinq Etats et gouvernements qui participent au IXe Sommet de la Francophonie, vingt continuent de bafouer la liberté de la presse : le Burkina Faso, le Cameroun, les Comores, Djibouti, l'Egypte, la Guinée, la Guinée-Bissau, la Guinée équatoriale, Haïti, le Laos, le Liban, le Maroc, la Mauritanie, le Niger, la République démocratique du Congo, le Rwanda, les Seychelles, le Togo, la Tunisie et le Viêt-nam.

Aujourd'hui, on constate plus de violations de la liberté de la presse dans des Etats francophones que lors du précédent Sommet de Moncton, au Canada, en septembre 1999. Ainsi, en trois ans, trois journalistes ont été assassinés dans des pays francophones, 264 ont été arrêtés et 183 ont été agressés. Par ailleurs, 223 médias ont été censurés, interdits ou fermés par les autorités de ces Etats. Enfin, au 1er octobre 2002, 14 journalistes étaient incarcérés dans huit pays francophones.
 
C'est pourquoi Reporters sans frontières appelle à des sanctions contre plusieurs Etats membres. L'organisation demande, comme le précise la Déclaration de Bamako qui prévoit des sanctions "en cas de rupture de la démocratie ou de violations massives des droits de l'homme", la suspension des quatre pays les plus répressifs en matière de liberté de la presse : la Guinée équatoriale, le Laos, la Tunisie et le Viêt-nam.

Ne prendre aucune décision concrète, lors du sommet de Beyrouth, reviendrait à admettre que ces engagements ne sont que de la poudre aux yeux pour rassurer et tranquilliser la
communauté internationale. La Francophonie aura alors définitivement perdu tout crédit en matière de protection des droits de l'homme et de la liberté de la presse. Et les populations des Etats membres sauront qu'elles n'ont plus rien à attendre d'une organisation passive, complice de chefs d'Etat dont les pratiques bafouent tous les jours la liberté de la presse, et, au-delà, l'ensemble des droits de l'homme.
 
Trois journalistes tués dans l'exercice de leurs fonctions

En Haïti, deux journalistes ont été tués pour avoir exercé leur profession. Le 3 avril 2000, Jean Dominique, le journaliste et analyste politique le plus connu du pays, a été abattu dans la cour de Radio Haïti Inter dont il était le directeur. Depuis son ouverture, l'enquête a rencontré de nombreux obstacles : menaces reçues par le juge d'instruction et la famille de la victime, mort du principal suspect dans des circonstances douteuses, blocage par le Sénat connu pour son indépendance de ton, Jean Dominique avait notamment critiqué Dany Toussaint, un sénateur de Fanmi Lavalas, le parti du président Jean-Bertrand Aristide.

Plus récemment, le 3 décembre 2001, Brignol Lindor, responsable de l'information de Radio Echo 2000, a été tué à coups de pierres et de machette. Le journaliste avait reçu des menaces après avoir invité des personnalités de l'opposition à intervenir dans son émission "Dialogue". Dix mois plus tard, les exécutants comme les instigateurs n'ont pas été inquiétés bien que les premiers aient revendiqué leur forfait. Cet assassinat est en réalité la conclusion d'une série de menaces et d'agressions contre des journalistes de la part de partisans déclarés du gouvernement. Il s'intègre dans une stratégie plus large des autorités de recourir à des milices paralégales pour intimider la presse.
 
Au Burkina Faso, le 21 octobre 2001, Michel Congo, âgé de 23 ans, étudiant en journalisme et collaborateur du quotidien privé 24 Heures, a été tué à son domicile. Depuis, la presse burkinabé et plusieurs associations de défense des droits de l'homme ont demandé la création d'une commission d'enquête indépendante. Les motifs du meurtre de Michel Congo restent inconnus, mais de nombreux observateurs locaux ne croient pas à un simple crime crapuleux.

Par ailleurs, "l'affaire Norbert Zongo", du nom de ce journaliste assassiné en décembre 1998, n'est toujours pas élucidée. Le 2 février 2001, l'adjudant Marcel Kafando a été inculpé d'"assassinat" et "incendie volontaire" dans le cadre de ce dossier. Il faisait partie des six "sérieux suspects", tous membres du Régiment de la sécurité présidentielle (RSP), désignés par une commission d'enquête indépendante. Un mois plus tôt, François Compaoré, le frère du président de la République, avait été entendu par un juge d'instruction. Largement impliqué dans cette affaire, le frère du chef de l'Etat bénéficie toujours d'une totale impunité.

264 journalistes arrêtés en trois ans

Plus des trois quarts de ces arrestations ont eu lieu en Afrique subsaharienne. Dans la seule République démocratique du Congo, 66 professionnels de la presse ont été interpellés. Depuis la mort de Laurent-Désiré Kabila, en janvier 2001, la situation ne s'est guère améliorée. Le nouveau président, Joseph Kabila, a annoncé la fermeture de nombreux centres de détention illégaux. Néanmoins, Guy Kasongo Kilembwe, rédacteur en chef de l'hebdomadaire Pot-Pourri, a été détenu pendant vingt-trois jours dans un cachot dont la fermeture avait été officiellement annoncée plusieurs semaines auparavant.



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