|
De notre correspondante à
Paris, Patricia Saint
Clément
Copyright 2015 - Patricia
Saint-Clément
Bouches-du-Rhône, l'insupportable
attente - 16 avril 2015
La SNCM va-t-elle couler ?
Il y a un an, les salariés de la SNCM croyaient
encore qu'un plan de relance pour leur groupe
était possible. Le Président du directoire,
Marc Dufour avait présenté un plan de
restructuration, la compagnie avait gagné
l'appel d'offres pour la desserte
Corse-Continent. Les actionnaires en particulier
Veolia et Transdev n'accompagnaient pas le groupe
et sa direction, puisqu'ils avaient demandé à
s'en retirer mais l'Etat actionnaire semblait
être un partenaire pour les salariés. La menace
de remboursement des 440 millions que la justice
Européenne jugeait anormalement perçue,
inquiétait mais le gouvernement, en particulier
Frédéric Cuvillier, Secrétaire d'Etat aux
Transports, était plutôt rassurant. Il serait
possible de trouver une solution.
Aujourd'hui tout a changé, le plan Dufour est
mort depuis longtemps. Le Ministre a quitté ses
fonctions et les acteurs du dossier se sont
aperçus que Bruxelles non seulement réclamait
les remboursements à l'État et à la
Collectivité Territoriale Corse mais les
exigeait dans les plus brefs délais. Transdev
est parvenu à infléchir l'opinion de l'État
actionnaire qui a fini par voter les changements
voulus par le transporteur. Le nouveau président
du directoire a présenté un plan stratégique
qui prévoit la suppression de la moitié des
postes et les actionnaires sont parvenus à
obtenir une mise en redressement judiciaire
qu'ils demandaient depuis longtemps. Depuis le 28
novembre 2014, le tribunal de commerce de
Marseille est en charge de trouver un avenir à
la SNCM.
Frédéric Alpozzo, responsable de la CGT qui
s'est toujours battu contre la mise en
redressement se dit aujourd'hui « inquiet pour
l'avenir. Des centaines d'emplois vont être
sacrifiées. De nombreux sous-traitants n'ont
aucune garantie sur leur avenir et si rien ne
bouge dans les prochaines semaines, nous serons
en grande difficulté parce qu'il sera très
difficile d'ouvrir les réservations pour l'été
prochain avec un taux de remplissage qui
permettra de poursuivre l'activité à long terme
». Les cadres et agents de maîtrise syndiqués
à la CFE CGC ont la même inquiétude.
Cependant, il y a aussi des fausses notes
syndicales, puisque le Syndicat des Travailleurs
Corses a annoncé qu'il s'opposait à tous les
dossiers de reprises qui ont été présentés
aux syndicats, il y a quelques jours. Alain
Mosconi estime qu'ils n'ont aucune chance
d'offrir un avenir à la SNCM. Les autres
organisations dénoncent des pertes d'emplois
trop importantes et un avenir incertain, ils se
plaignent aussi de certains dossiers qui n'ont
pas réellement d'intérêt mais il semble y
avoir une frontière syndicale entre Marseille et
la Corse. Est-ce par réalisme ou pousser une
autre solution jugée plus souhaitable par la
Collectivité Territorial Corse et son Président
Paul Giacobbi, qui réclament depuis plus d'un
an, la mise en redressement et la création d'une
compagnie régionale gérée par l'Office des
Transports Corses.
Les repreneurs existent. Ils sont trois. Baja
Ferries représenté par Daniel Berrebi, Daniel
Garin, ancien responsable du Port de Marseille et
le transporteur corse Patrick Rocca ont fait des
offres. Si elles ne sont pas toujours comparables
en ce qui concerne l'emploi ou les résultats
attendus, ces propositions posent les mêmes
conditions : une décision rapide et la
transmission de la délégation de service
public.
Les trois candidats ont rencontré, avec
l'administrateur judiciaire, les responsables
européens. Parce qu'en réalité c'est Bruxelles
qui a l'avenir de la SNCM entre ses mains.
Cependant le porte parole de la direction
générale de la concurrence renvoie la
responsabilité des décisions à la France.
Après sa double condamnation pour des aides
perçues abusivement, la SNCM doit rembourser 440
millions à l'État et aux autorités corses. La
seule manière de s'y soustraire était la mise
en redressement judiciaire et le changement de
personnalité morale. Cette discontinuité
économique semble acquise mais la France et la
SNCM demandent maintenant à Bruxelles
d'accepter, en ce qui concerne la desserte de la
Corse, que le repreneur soit considéré comme
étant dans la continuité de la SNCM. La
réponse devrait tomber rapidement. Il n'est pas
sûr qu'elle soit positive. Le 7 avril, le
tribunal de commerce de Bastia décidait de
donner raison à Corsica Ferries et de dénoncer
la DSP actuelle.
Il y aura alors un grand vainqueur, Corsica
Ferries. Ce groupe qui pratique une politique
sociale low cost, n'a cessé de porter plainte
contre la SNCM mais n'a jamais été en mesure de
présenter une proposition sérieuse pour la
délégation de service public, serait alors le
seul transporteur important vers la Corse. Les
syndicats pensent aussi que la Compagnie
Méridionale de Navigation, alliée historique de
la SNCM, dont l'actionnaire principal est STEF,
n'a pas déposé d'offres parce qu'elle attend la
liquidation pour reprendre les activités qui
l'intéressent. Le problème c'est que cela fait
plus de deux ans, que les actionnaires de la
SNCM, Veolia et Transdev, ont engagé le combat
et que les salariés ne savent toujours pas ce
qu'ils vont devenir. Cette attente est
insupportable pour les 2000 salariés de la SNCM,
dont plus de la moitié risque de perdre son
emploi. Insupportable aussi pour ceux qui ont
besoin de la SNCM pour travailler, qu'ils soient
sous-traitants ou entrepreneurs en Corse. La
solution sera forcément douloureuse, le temps ne
fait qu'empirer la situation.
Chez Total, fin de moratoire, début de
restructuration
Dans les Bouches-du-Rhône, ils ne sont pas les
seuls. Cette attente insupportable existe aussi
à la raffinerie de La Mède. Les salariés de
Total sont prévenus depuis le mois de septembre
que cette plateforme doit faire lobjet dune
importante restructuration. Depuis six mois, ils
attendent de connaître leur sort.
Fabien Cros, secrétaire du CE, CGT dénonce une
« politique qui casse le raffinage en France
parce quen délocalisant le groupe
bénéficie de marges plus fortes et de
réglementations moins contraignantes quen
France. ». Il demande surtout des « réponses
claires et une date pour louverture des
procédures dinformation des salariés. »
Et dénonce « une politique de la direction qui
consiste à trouver des arrangements avec les
organisations syndicales alors que plus de 200
postes seront supprimés dans cette opération
». Le délégué Force Ouvrière Bruno Casano a
demandé louverture de négociation en
amont, il a été rejoint par la CFDT et la CFE
CGC. Il veut également « des réponses aux
questions importantes : ce qui sera fait demain
dans la raffinerie, sur la manière dont les
départs seront gérés et sur ce quil est
possible de sauver ». Une première réunion a
eu lieu à la fin du mois de février et na
pas permis de réelles avancées, une autre le 9
mars. Les syndicats font des propositions mais
leur direction ne semble pas très rapide pour
leur répondre de manière détaillée. Le
calendrier de la procédure d'information n'est
à ce jour toujours pas connu.
Toutes les organisations syndicales dénoncent
une politique qui vise à importer toujours plus
de pétrole raffiné, même si cela peut devenir
un problème pour le Port de Marseille et pour lindépendance
énergétique de la France. Ils font aussi le
même constat, les investissements qui ont été
réalisés dans la raffinerie ces dernières
années nont pas été assez constants et
importants pour préserver son avenir. Le groupe
devrait rapidement entrer dans le vif du sujet,
des rumeurs font état du développement dune
bioraffinerie, mais combien demplois
seront-ils encore perdus dans une industrie
française qui ne semble toujours pas avoir
terminé sa mue et souffre toujours d'un manque
d'investissement chronique. Les dirigeants ont
promis que les salariés pourraient rester dans
le groupe, mais il y aura forcément des
départs, ceux qui ont atteint un certain âge ou
ceux qui ne peuvent pas ou ne veulent pas quitter
une région où ils ont leur vie. Il faudra aussi
que le gouvernement donne des réponses à ces
salariés démunis alors que la majorité des
grands groupes bénéficient de soutiens que ce
soit le CICE ou de baisses de charges grâce au
pacte de responsabilité. L'attente devrait être
de courte durée puisque le groupe convoque un
CCE extraordinaire le jeudi 16 avril dont l'ordre
du jour est l'avenir du raffinage.
Pour le département ces deux dossiers seront-ils
de nouveaux coups durs en perspective, après la
fermeture de plusieurs entreprises emblématiques
? Aujourdhui seuls les anciens Fralib parce
quils ont forcé le passage pour se
réinventer en SCOP sont parvenus à inverser une
tendance qui est tout de même négative. Il
existe aussi des projets davenir à
proximité de Marseille mais combien de postes
concerneront-ils vraiment les salariés de ces
groupes ?
Patricia Saint Clément
Affichez librement ce logo sur votre site !
Le ruban bleu est le symbole sur le Web
de la défense de la Liberté d'expression !
Bon surf !
-
|
|