De notre correspondant à Paris (75), Stéphane LOISON


18 janvier 2012

Auditorium du Louvre, le Louvre, Paris
Kronos Quartet

Bryce Dessner : Aheym
Nicole Lizée : Death to Kosmische
Alireza Farhang : Tak-Sim
Wolfgang Rihm : Quatuor à cordes n°7
Laurie Anderson : Flow
Steve Reich ; WTC 9/11

5ème Biennale de quatuors à cordes à la Cité de la Musique et présence du Kronos Quartet. Mondialement connu depuis plus de trente ans c’est toujours une belle surprise artistique de l’entendre et de le voir. Tous les compositeurs contemporains sont ravis d’être interprétés par ce quatuor de légende. Le programme était très éclectique. Il nous a proposé du pur compositeur dans la suite logique de la musique moderne comme le prolifique Rihm, (ce compositeur est mis à l’honneur dans cette biennale ; tous ces quatuors sont joués par des formations différentes et de grandes qualités), des compositeurs issus de la pop musique tels que Dessner et Anderson, le pape de la musique minimaliste Steve Reich et un jeune compositeur "world music" iranien Farhang.

Eclairé par des couleurs subtiles, le Kronos a interprété ce lourd programme avec le sérieux qu’on lui connaît ; intensité et brio étaient présents et ce malgré des faiblesses flagrandes de composition pour certaines. La plupart étaient jouées pour la première fois à Paris. "Aheym" de Dessner est une composition agréable, de facture assez "classique" dans la forme contemporaine comme l’est le quatuor n° 7 de Rihm. L'oeuvre de la québécoise Lizée, "death to Kosmische" est très inventive, avec un brin d’humour, où se mêlent le quatuor proprement dit et des instruments électroniques archaïques tels que le stylophone et l’omnichord. L’œuvre de Tak-Sim pose problème. C’est la quadrature du cercle. A-t-il voulu occidentaliser sa composition ? Ca ne fonctionne pas. A-t-il voulu transformer un quatuor, aux sonorités occidentales, en une sorte d’instrument iranien ? Ca ne fonctionne pas. Son passage à l’IRCAM n’arrange pas les choses. La nappe électronique est assez plate, peu inventive et n’enrichit pas la composition, même la dessert ; Bref "Tak-Sim" est un coup d’épée dans l’eau et mise à côté des œuvres proposées cela ne l’a guère servi. A vouloir tout déstructurer le résultat final n’est pas convaincant. Farhang doit se poser la question, il est encore jeune, espérons qu’il trouvera la réponse mais sûrement pas à l’IRCAM ! Après une petite pose avec la courte composition charmante d’Anderson, c’était la découverte de WTC 9/11 de Reich. C’est Reich nouvelle manière. Il s’est éloigné de la musique minimaliste, fait intervenir des samples de voix (ici ce sont des voix en rapport avec le 11 septembre) et une démultiplication du quatuor soit un en direct et deux préenregistrés ; L’ensemble est très prenant, il faut comprendre l’américain pour saisir tout le sens de cette œuvre. Comme à son habitude les bis du Kronos sont à cent lieux de ce que l’on vient d’écouter. Bob Dylan, un tango égyptien et "la foule", immortalisée par Piaf, chantée par un américain accompagné par son accordéon, amenèrent le sourire après ce programme très sérieux. Le Kronos Quartet malgré sa longévité ne nous lasse toujours pas.


Stéphane Loison