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De notre correspondant à
Paris (75), Stéphane LOISON
IMAGINE - 16
octobre 2013
Un film de Andrzej Jakimowski
Avec Edward Hogg, Alexandra Maria Lara, Melchior
Drouet
Sortie le 23 octobre 2013
Sur les hauteurs de Lisbonne dans un
établissement spécialisé pour des jeunes
enfants malvoyants, un professeur
dorientation spatial, malvoyant aussi,
arrive. Enseignant, aux méthodes originales, il
apprend aux élèves à se repérer en écoutant
la résonance des sons des éléments qui les
entourent. Bien au-delà de ses cours, il
souhaite que ses élèves développent leur
imagination pour découvrir le monde autrement.
Ce ne sera pas sans risque
Cest le troisième film de Andrzej
Jakimowski. Ses deux précédents ont été
couronnés de nombreux prix internationaux et
celui-ci en mériterait tout autant. Cest
un film solaire, optimiste ce qui pourrait
paraître paradoxal sur un tel sujet où les
acteurs sont de vrais malvoyants. A première vue
lhistoire est comment apprendre à ces
jeunes malvoyants à dépasser leur cécité,
pouvoir se libérer de leur canne blanche pour
que le regard de lautre, celui qui
soi-disant voit ne soit pas ce regard de pitié
face l handicape. Pendant tout le film ces
jeunes aveugles sous la direction de Ian joué
magnifiquement par Edward Hogg, lacteur en
devenir, qui interprète un malvoyant dune
manière quasi naturelle, apprennent à faire des
gestes quotidiens, à savoir écouter, analyser
ce qui les entoure et imaginer cet espace inconnu
riche denseignements. Mais à partir de
cette histoire passionnante quasi documentaire,
Jakimowski nous interroge sur ces fonctions que
sont la vue et louïe, le voir et
lentendre, en proposant un bel exercice de
cinéma. Nous les spectateurs du quotidien, nous
les spectateurs du film savons nous regarder ?
écouter ? On voit mais on ne regarde pas, on
entend mais on nécoute pas tel est le
constat du réalisateur. Nous ne voyons pas les
choses telles quelles sont, nous les voyons
telles que nous sommes ; Les vieux joueurs de
dame au bar où Ian et la belle aveugle Eva (
jouée par Alexandra Maria Lara) vont prendre le
soleil, imaginer lenvironnement, nont
jamais regardé ce qui les entoure, seul leurs
pions sont leur champs de vision ; Le premier
plan du film nous fait entendre un chien qui
halète, il a chaud. La bande son précise attire
notre regard, cest là tout lart du
cinéma, le son attire notre regard. Le
réalisateur va jouer pendant tout le film à
travers « le regard » imaginaire des malvoyants
pour nous apprendre à voir et à entendre ce que
nous devrions regarder et écouter. Il ny
aura pratiquement de contrechamps, on ne voit pas
ce qui est en face des malvoyants, on restera sur
les enfants, sur les gestes quils font ;
Dans la virée de nuit de Ian avec Serrano (joué
par un acteur malvoyant exceptionnel Melchior
Drouet) on ne verra pas le port, le bateau qui
est soi-disant à côté deux, on
limaginera grâce aux sons. Cette séquence
est particulièrement bien filmée, car
Jakimowski crée une tension entre nous et eux en
filmant en plongé leur approche très près de
leau à nous donner le vertige. Andrzej
Jakimowski, nous donne une grande leçon de
cinéma et de vie. Ses études en philosophie en
sont sûrement pour quelque chose . « Tous les
yeux regardent, peu observent, très peu voient
» . Alors allez voir "Imagine !"
Stéphane Loison
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